La pernicieuse Loi sur Investissement Canada fait encore la Une dans un lock-out

2010-11-18 09:44:17Nouvelle

Le soir du 7 novembre, l’U.S. Steel Corporation a déclaré un lock-out contre 900 adhérents de la section locale 1005 de l’United Steelworkers (USW) de son aciérie de Hamilton, dans l’Ontario. Motif invoqué : le refus du syndicat de soumettre un projet de convention truffé de concessions au vote de ses membres.

En 2007, U.S. Steel a racheté Stelco Inc. et ses deux aciéries – Hilton Works, à Hamilton, et Lake Erie Works, à Nanticoke, dans l’Ontario – pour 1,1 milliard $US. La Loi Investissement Canada stipule qu’un investissement étranger dans une entreprise canadienne doit rapporter un « bénéfice net » au Canada.

Le lock-out d’il y a huit jours découle de cette clause bancale. En fait, pendant huit mois depuis le début août 2009, un millier d’ouvriers sidérurgistes de Lake Erie Works ont subi un lock-out tandis que U.S. Steel leur arrachait des réductions de pensions et d’autres concessions.

La situation est pratiquement la même aujourd’hui à Hamilton. Le sidérurgiste américain refuse d’encore appliquer le régime de retraite à prestations déterminées aux nouveaux embauchés et veut supprimer l’indexation des pensions de 9.000 retraités de Stelco, des concessions qui représenteraient en tout 80% de l’indexation sur le coût de la vie et la perte de deux semaines de congé.

Un médiateur provincial a annoncé ces mesures au comité de négociation de la section 1005 le 4 novembre, trois mois avant l’échéance de la convention collective. Le syndicat refusant de soumettre cette proposition a vote, comme l’exigeait la direction, celle-ci a prononcé le lock-out. La section locale 1005 veut le statu quo dans une nouvelle convention collective.

« Le gouvernement et U.S. Steel ont promis à ces travailleurs et à leur communauté que le rachat de Stelco par cette multinationale étrangère serait à leur avantage », dit le Directeur national canadien de l’USW et Vice-président de l’ICEM Ken Neumann. « Au lieu de cela, ce rachat n’est que source d’ennuis et de souffrances pour les familles de travailleurs. Le « bénéfice net » de U.S. Steel se traduit par des fermetures d’usines, des réductions de la production, des pertes d’emplois et des conflits sociaux. »

Par deux fois au cours des deux dernières années, U.S. Steel a défié la Loi sur Investissement Canada. Il y a à peine cinq semaines, le 8 octobre, elle a arrêté le haut fourneau de Hamilton et mis la production d’acier à l’arrêt en invoquant le manque de commandes. Bien qu’aucun travailleur n’ait été licencié à l’époque, cette fermeture était le signe avant-coureur du lock-out du 7 novembre.

Entre novembre 2008 et mars 2009, neuf mois à peine après avoir racheté Stelco, U.S Steel a licencié 1.500 des 2.000 travailleurs des deux sites d’exploitation en déplaçant la production vers des aciéries aux États-Unis. Le gouvernement canadien tente de faire appliquer la Loi sur Investissement Canada. Il a intenté une action devant la justice fédérale contre U.S. Steel pour non-respect de ses promesses en matière d’emploi et de production à la suite de ces fermetures.

Le gouvernement réclame des amendes allant jusqu’à 10.000 $ canadiens par jour pour infraction à la loi.

Mais, dans la procédure, toujours en cours à l’heure actuelle, U.S. Steel invoque la récession économique pour justifier le ralentissement de la production canadienne d’acier. Si s’ajoute à la délocalisation de la production – qui viole aussi la loi canadienne – la quasi parité entre les dollars canadien et américain, ce déplacement de la production devient économiquement intéressant pour l’entreprise. Les brames d’acier fabriquées à Hamilton et Nanticoke devaient être envoyées au sud pour le finissage et la faiblesse du dollar américain fait que la production d’acier brut est maintenant moins chère aux États-Unis.

Ken Neumann a vu trop souvent piétiner la Loi sur Investissement Canada. « Que ce soit Vale à Sudbury, au Labrador, ou U.S. Steel à Hamilton et Nanticoke, les firmes étrangères n’ont aucun scrupule à renier leurs engagements et à causer des ravages économiques », déclare-t-il.

Ken Neumann, l’USW et tous les syndicats d’industrie canadiens veulent un remaniement de la Loi sur Investissement Canada, des révisions qui offrent de réelles garanties sociales et économiques aux travailleurs concernés par des rachats d’entreprises.